CSF Magazine n° 127 - Nos députés font-ils encore la loi ?
Nos députés font-ils encore la loi ?
En décrétant que « la souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants », les Révolutionnaires ont établi la légitimité démocratique de l’Assemblée nationale. Les citoyens n’acceptent d’autres règles, d’autres contraintes, que celles votées par leurs représentants. Seul le Parlement (qui comprend l’Assemblée nationale et le Sénat) peut voter les lois, arrêter le budget, fixer l’impôt, contrôler le gouvernement. Cela, c’est le principe. La réalité est-elle au rendez-vous ? En dernier ressort, la loi ne relève que du Parlement. Mais pour en débattre, encore faut-il qu’un projet soit inscrit à l’ordre du jour. Et ce droit est d’abord exercé par le gouvernement. L’Assemblée nationale discute donc, pour l’essentiel, des projets partagé » entre chaque assemblée et le pouvoir exécutif. Par exemple, lors de la dernière législature 2017-2022, sur 354 textes adoptés, 114 seulement étaient issus de propositions de députés.
De plus, dans le débat, les armes sont parfois inégales : d’un côté, un ministre qui s’appuie sur son administration, son armée de juristes et d’experts, de l’autre des députés moins bien outillés. La technostructure impose sa compétence. Cela est encore plus vrai pour le budget : c’est le gouvernement qui propose, secondé par toute l’expertise du ministère du national, même postérieur (depuis le célèbre arrêt Costa contre Enel de 1964). Il est donc impossible qu’une loi nationale modifie une directive. En revanche, à son agenda, il trouvera beaucoup de projets de loi portant transposition en droit français des directives européennes. « La proportion du droit communautaire dans le droit français est comprise entre 60 et 70 % des textes nouveaux », estime le ministère de la Justice.